Bill était beau. Bill était grand. Bill était mort.

Cher Bill.

Mes mains tremblent et mes larmes tombent sur cette feuille alors que je ne devrais pas. Tu me l’avais fait promettre. Tu m’avais demandé d’être forte et de ne pas pleurer. Et j’ai acquiescé, mais je suis désolée, je n’y arrive pas.
Tom pleure autant que moi, tu sais ?
Mon cœur, ça va bientôt faire trois mois, et je ne suis toujours pas remise de ton départ. Pour tout dire, personne, ne s’en est réellement remis. L’Allemagne entière était en deuil, mais aussi tous les autres pays que vous avez conquis.
Tu venais d’avoir tes vingt ans, nous étions fiancés. On était heureux.
Personne ne se remet. Tom est au bord du gouffre, et je n’ai ni la force, ni même l’envie de le retenir. Pourtant, je te promets que j’essaye. Pour toi. Mais c’est trop dur. Car le voir lui, c’est te voir toi.
Ton absence nous pèse, nous oppresse et nous étouffe.
J’ai ton visage encore devant mes yeux, j’ai ta voix sur mon MP3 et lorsque j’ai le sentiment de l’oublier, je ré-écoute tous vos albums. Celui où ta voix n’avait pas mué, et les autres, où tu avais cette voix qui me faisait chavirer, qui m’envoyait au paradis. Au septième ciel.
La bague de fiançailles est toujours à mon annulaire et elle ne le quittera pas.
Ton coussin est toujours à sa place, mais ton odeur n’y est plus. Je dors toujours du côté droit attendant patiemment que tu reviennes . En vain. Et c’est toi qui me murmurais les paroles de Ich bin da ?
J’arriverai presque à croire que tu m’as menti. Je lui en veut.
Mon bras droit est toujours sur la gauche comme quand on s’enlaçait. Mon bras sur ton ventre et le tien sur mon dos.
J’ai les photos de nous toujours sur ma table de chevet et chaque soir, je repense à nous.
J’ai à peine vingt ans et j’ai l’impression d’en avoir quatre vingts.
Chaque soir, je revois ma vie. Avant et avec toi. Et chaque soir, je revois notre fin. Oui, Bill. La Nôtre.
Car sans toi, je ne suis plus rien. Tu étais grand, Bill, tu étais Beau, tu étais vivant. Et on S’aimait. Chéri, tu sais, Elle, elle est Simplement en prison. J’ai voulu la tuer de mes propres mains et la faire souffrir autant qu’elle nous fait souffrir. Mais Georg m’a empêchée, j’ai tout fait pour lutter, mais il a insisté et gagné. Et elle, elle est encore en vie, alors que toi, non.
Mon cœur, je revois encore ce 13 septembre au soir, le jour de mes 19 ans. Tu m’avais dit que tu avais un cadeau extraordinaire à m’offrir. Mais il était a l’extérieur. Dans notre parc, précisément. Des guirlandes étaient disposées et illuminées. Des bougies étaient également placées de part et d’autres et nous étions au centre.
La lumière de la Lune et celle artificielle se reflétaient sur toi et dans tes yeux. Je t’aime, tu le sais, pas vrai ?
Tu venais de me faire ta demande en fiançailles et puis tu m’a prise dans tes bras. Et je ne sais combien de temps, on est restés, ainsi. Dans tes bras, ma tête contre ton torse.
Je sais juste que je passais mon temps à t’admirer, à admirer cette bague aussi et t ’embrasser.
Tu avais raison, mon cœur, ton cadeau fut extraordinaire.
Un hurlement se fit entendre, un coup de feu, puis rien. Le silence.
Je sentis quelque chose couler. Je baisse les yeux et vis ton sang. Elle t’avait visé en plein abdomen. Ton visage afficha la stupeur et la peur mais tes lèvres ont quand même réussi a dessiner un sourire et tu m’as dit ceci : « Sois forte, ne pleures pas, on se retrouvera. Je t’aime mein engel »
Je n’ai même pas eu le temps de te répondre que moi aussi, je t’aime , tu avais déjà fermé les yeux et que mes larmes coulèrent. Tu étais beau, tu étais grand, tu étais mort.
A l’heure actuelle, je ne vis plus que pour Tom. Mais plus pour longtemps. Je veux te rejoindre et t’aimer pour l’éternité.